Déjeuner sur l’inclassable terrasse du Carlton
Les beaux jours ont élu résidence sur la Croisette. La chasse aux terrasses est ouverte. Des passants (plusieurs milliers par an) se prennent en photo devant la façade du Carlton InterContinental, sous le regard distrait d’une clientèle qui n’a d’yeux que pour ce qu’elle s’apprête soit à déguster, soit à dévorer. Un gage de qualité, reconnu depuis l’inauguration de l’hôtel en 1913. Comment résister à cette plateforme gastronomique de toute évidence incontournable ? La silhouette de quelques célébrités se profile qui plus est derrière une végétation suffisamment discrète pour ne pas cacher la mer. Rien d’étonnant : la 71e édition du Festival de Cannes est en cours.
Inséparable de cette manifestation d’envergure internationale, l’histoire du Carlton s’inscrit parallèlement dans une chronologie plus politique. En Angleterre, son nom, dont les racines scandinaves signifient « La Ville de l’Homme libre », rime avec aristocratie. Et pour cause, elles sont légion les personnalités à avoir défilé dans l’hôtel. Le Grand-Duc Michel de Russie, par exemple, qui a fortement contribué aux côtés de Sir Henri Ruhl à la construction de l’établissement, avait l’habitude de prendre son « Five O’Clock Tea » tous les jours au bar. En janvier 1922 le Carton accueille, la première conférence de la Société des Nations, et en 2011, le G20 ; ce qui ne l’empêche pas de rester le principal partenaire hôtelier du Festival International du film, depuis son lancement en 1939. Vingt ans plus tard exactement, Alfred Hitchcock y tourne la main au collet avec Grace Kelly et Carry Grant.
Le double héritage anglais et russe du Carlton justifie quelques ajustements dans le menu de son restaurant. Une compotée de fruits rouges a été ajoutée à l’appareil de la tarte au citron meringuée – dessert signature qui figure dans le trio sucré du café gourmand – afin de complaire à la clientèle slave, réfractaire à toute forme d’acidité dans l’assiette.
Couronné de lauriers, l’InterContinental jouit également depuis l’an passé d’un Green Globe, récompense qui atteste son engagement dans le développement durable, le respect des producteurs locaux ainsi que de sa clientèle. Cette distinction est essentiellement due au chef Laurent Bunel dont la créativité n’a d’égal que sa passion et son exigence. Conjugué au talent de Daniel Canton, le sommelier de la Maison, la carte prend une tout autre dimension. On pourrait parler de septième ciel en cette saison festivalière consacrée au septième art. La cave vaut la peine d’être visitée. Mais si on lézardait avant sur la plage de l’hôtel. Après tout, la Méditerranée n’est-elle pas la plus belle piscine du monde ?