Bienvenue à bord de la Pérouse
Barto+Barto sont dans un bateau. Le bateau reste à flot. Qu’est-ce qui reste ? La Pérouse. Classé « Patrimoine du XXème siècle », en 2011, cet hôtel nantais rend hommage au travail de ce couple d’architectes légendaire. Pourquoi ne pas le remplacer par un bâtiment entièrement neuf ? La ville manque déjà cruellement de patrimoine dit « historique ». C’est pourquoi chaque monument un tant soit peu travaillé mérite une attention et un soin accrus. À la rénovation sur-mesure de cet établissement, répond une visite sur-mesure.
L’immeuble penche à l’instar de ses voisins. Il ne dépasse pas la façade mitoyenne, conformément au strict cahier des charges confié à Clotilde et Bernard Barto, dans les années 1990. Regroupés en trois travées, les rectangles horizontaux qui font office de fenêtres créent l’illusion de quatre étages, alors que l’hôtel en compte sept. Si ce monolithe en béton se fond parfaitement dans le centre nantais, c’est en partie parce qu’il a été recouvert d’une couche de 15 cm de pierre de Richemont. On avance sur le bitume qui a contribué à combler l’Erdre, dans l’entre-deux-guerres, et à former l’actuel cour des 50-Otages.
Le séjour s’apparente, dès le seuil, à une croisière. La passerelle d’entrée en bois de hêtre donne le ton du décor. L’ascenseur, juste en face, jouit d’une double ouverture, donnant accès, aux chambres « 01 02 03 04 », d’un côté ; « 05 06 07 », de l’autre. Ainsi les architectes ont réussi à gagner de l’espace. De même, en réduisant la hauteur sous plafond. On quitte ce palier mobile pour regagner ses pénates. La poignée de porte rappelle d’emblée l’univers marin. Dotés d’un système d’œillet bien particulier, les rideaux en toile épaisse se hissent telle une voile. Le mobilier en bois fabriqué par les Chantiers de l’Atlantique flirte harmonieusement, tantôt avec la chaise Zig Zag de Thomas Rietveld, tantôt avec la chaise Hamlet Machine de Heiner Müller, dans la salle de bains.
C’est la pièce qui a demandé le plus de travail en général. Les murs étaient noirs d’humidité. Il aura fallu retrouver un carrelage qui convenait aux architectes d’une exigence implacable. Le reste des parois de la Pérouse sont tapissées de stucco, mélange de marbre et de chaux couramment utilisé dans l’Antiquité. Ce qui lui confère une brillante douceur. Les larges vasques transparentes sont signées d’un artisan local, lequel se serait brûlé les mains à l’ouvrage. Le petit-déjeuner fait également la part belle aux produits régionaux. Avis aux lève-tôt : il est servi dès 6h du matin. Une chance ! Ainsi, reste toute la journée pour découvrir la ville.