Expérience exceptionnelle : la pêche au saumon en pleine nature écossaise
Article publié sur Atlantico.fr le 28 décembre 2013
Le nord du Royaume Uni est d’autant plus humide que le soleil s’y montre timide. Une fraîcheur qui s’accentue sur la Spey tandis que l’on attend patiemment la montée des saumons. Peu importe la météo, quand on a la chance de pêcher sur le deuxième fleuve le plus long et le plus rapide d’Écosse. On se prépare en hâte, avant de se laisser captiver par la beauté du paysage alentour. Paré d’un ciré et de bottes, on se sent invincible ; alors qu’il reste tout à apprendre du Spey Casting, cette technique de pêche propre aux habitués de la région.
Généralement lorsque l’on pêche à la ligne, c’est-à-dire à l’aide d’un leurre fixé au bout d’une canne, quelques précautions sont à prendre. Au-delà d’un bon matériel, il faut, cela va de soi, éviter d’enfoncer son appât trop profondément dans l’eau, mesurer la force de ses lancers, se placer face à la lumière, remonter doucement hameçon et poisson afin que ce dernier ne s’enfuit pas. On regarde tout autour : d’énormes rochers se profilent à l’horizon, compromettant, a priori, toute chance de capture. Et si la ligne se coinçait entre deux arbres, par exemple ? C’est pour contrer ce genre de déconvenue que l’on a inventé le Spey Casting, dont découlent différentes sous-techniques, du Single Spey, au Skadgit River Spey, en passant par le Double Spey, le Snake Spey, Forward Spey, Circle Spey, Snake Spey, « C » Spey, même si la plupart désignent le même geste, un geste qui implique l’intervention des deux mains, contrairement à d’autres lancers. D’ailleurs, on se rend compte que tenir la canne entre le pouce et l’index, ces deux points de prise, en haut et en bas de la grande poignée, permet une plus grande aisance, pourvu que l’on exerce la bonne pression ; mais ceci demande, bien sûr, de la pratique.
Et la chance du débutant, alors ? Quelle joie quand un premier saumon mord à l’hameçon ! Un saumon de quarante à cinquante centimètres de large ! La prise est si inattendue que l’on retente sa chance sans plus tarder. On relance sa ligne le plus loin possible, à plus de soixante centimètres du bord au moins. Quand on pense que le gouvernement a longtemps interdit aux experts d’emmener des amateurs pêcher avec eux de peur que les statistiques de captures ne baissent et ne rendent cette activité moins attractive d’un point de vue économique… Une politique « de rigueur » encore fortement contestée.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, trop d’eau nuit à la pêche. Non pas que les poissons risquent la noyade, mais l’activité en soi devient impraticable. Faute de pouvoir voguer sur la Spey, il est alors conseillé de se rabattre sur Tulchan, l’Umba, vers la Péninsule de Kola, ou encore la Varzuga, entre autres rivières voisines, riches en saumons, mais de moindre envergure. Plus le niveau est élevé, moins les poissons – au plus près de leur environnement naturel – ont de difficulté à s’échapper. Dans leur lancée restrictive, les autorités ont décidé de prohiber la pêche au filet à l’estuaire, ainsi que la pêche au filet en mer. Et afin de lutter contre la raréfaction de l’espèce, les saumons doivent être relâchés, à raison d’un sur deux – le premier, le troisième et le cinquième –, pour les mâles ; systématiquement, pour les femelles à l’approche de l’été. Grâce à cette mesure, les migrations ont rapidement progressé. Comme quoi les poissons capturés ne sont pas condamnés à être mangés. La pêche peut donc et doit, en l’occurrence, rester ludique.
Autre spécialité de la région : le whisky. Idéal pour se réchauffer après une longue partie de pêche. Mieux qu’une simple dégustation entre amis dans un pub traditionnel, la visite d’une distillerie de whisky, les deux tiers appartenant au groupe Speyside, le « triangle d’or » de cet alcool aux vertus nutritives incontestables. Pourquoi Speyside ? Parce que c’est dans les affluents du fleuve homonyme, la Fiddich, la Livet ou l’Avon, que la plupart des usines de la région puisent leur eau. Or qui dit humidité, dit fertilité de la terre où pousse l’orge utilisé pour la fabrique du whisky. Ainsi va le cycle de la boisson, une boisson le plus souvent aromatisée à la poire, à la pomme et aux fleurs.
Saumon, le matin ; whisky, l’après-midi… fusionnez les deux et vous obtenez : un saumon sauce whisky, le soir. Tel est le plat vedette du plus vieux B&B du coin. Fondé en 1771, Farm by the river est un établissement convivial augmenté d’une écurie. Idéal pour les cavaliers rêvant de caracoler le long de la Spey, tandis que leurs proches tentent avec plus ou moins de succès de piéger le dîner. Autre approche du fleuve : l’hôtel loue des patins à glace aux amoureux de l’hiver. Batailles de boules de neige entre les conifères de la région, modelage et relooking de bonhommes blancs et poudreux… La magie de décembre opère sur les flots qu’ils soient gelés ou non. Trempette dans le jacuzzi, à moins de se laisser tenter par les températures extérieures. Sonne l’heure du repas, au coin du feu. La salle à manger est comble. De quoi remplira-t-on son assiette, demain ?